dimanche 6 août 2017

Revue des deux mondes de mai 2017 : retour sur une polémique

Bonne nouvelle ! Céline fait encore vendre ! Sinon comment justifier la couverture accrocheuse de La Revue des deux mondes de mai 2017 après avoir lu les deux misérables articles qui sont consacrés à l’écrivain génial que l’on aime haïr.

 La une accrocheuse de La Revue des deux mondes de mai 2017
Dans son édito, Valérie Toranian tente de raccrocher la polémique provoquée par le pavé targuievien — somme toute très superficielle car il y aura toujours un fossé entre les amoureux de littérature et les idéologues de la bien-pensance —, de raccrocher la « polémique »  donc, au thème de la revue, « Comment aborder l’écrivain face au pouvoir » écrit-elle « sans revenir encore et toujours à Céline. » La question est curieuse quand il s’agit de Céline. À quel pouvoir a-t-il été confronté ? De même, il est difficile d’écrire sans sourire qu’il a souffert de la censure (du moins de son vivant). Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, son antisémitisme viscéral était partagé par un large lectorat qui faisait de ses pamphlets des succès commerciaux dont son éditeur a largement profité. Ses grands romans de l’après-guerre (que beaucoup considèrent comme ses meilleurs) ont assez facilement trouvé une place qu’ils n’ont plus quittée parmi les classiques du XXe siècle.
Les deux articles consacrés à la polémique sont très brouillons, écrits avec les pieds, sans doute trop vite. Ils ont été choisis pour prendre position entre des avis pas si opposés que cela et laisser à la revue le beau rôle de l’objectivité. Par chance, il n’a pas été fait appel à ce gugusse de Charles Dantzig (membre du comité de rédaction) pour intervenir dans le débat. Vous savez, Dantzig, ce producteur de France Culture qui ne manque pas, pour essayer de se faire un nom, une occasion de dire ou d’écrire que Céline n’est même pas un bon écrivain (comme si dans le cas contraire, cela aurait justifier son antisémitisme !).
Pour résumer les deux articles qui nous concernent, le mieux est de redonner la main à La directrice de la rédaction.
« Pour Stéphane Guéguan (conservateur au musée d’Orsay, Faut-il brûler Céline ?) aucune preuve irréfutable n’est apportée à la thèse du propagandiste stipendié et de la taupe nazie, et encore moins à l’hypothèse qu’il ait appris, dès 1942, et approuvé la solution finale. […] Cette sempiternelle chasse aux sorcières empêche d’admettre la part d’autonomie, de liberté imprescriptible, de la création artistique.
Pour Sébastien Lapaque (journaliste et écrivain, Avertissement aux célinomanes), en revanche, l’auteur de Bagatelles pour un massacre et de L’Ecole des cadavres, […] ne fut ni un pétainiste, ni un fasciste. Il fut pire que cela : un raciste hygiéniste et eugéniste pro-nazi. D’où son mépris pour la collaboration parisienne, qu’il suspectait de boy-scoutisme et de masturbation idéologique. »
Bien sûr, il y a aussi dans ce numéro de La Revue des deux mondes, un petit inédit de Céline (Le Secret d’Etat), une curiosité présentée par André Derval. C’est en fait une lettre de Norvège adressée à Roland Petit pour lui proposer un argument de ballet.
Tout cela était donc bien léger pour justifier la belle photo de « une » et mon achat.
Heureusement, poursuivant ma lecture, je suis tombé sur un article de Marion Dapsance intitulé Une éthique à géométrie variable, sous-titré L’étrange silence des bouddhistes français dans le débat sur l’avortement. Mais cela nous éloigne de notre sujet…